Éclairer une cuisine - le grand écart entre performance et convivialité
- Aude Grard
- 29 janv.
- 6 min de lecture
Dernière mise à jour : il y a 5 jours
Éclairer une cuisine : le grand écart entre performance et convivialité
Cuisine ouverte, meubles design, matériaux nobles...la cuisine est devenue une pièce de vie, aussi noble que le salon : on y dîne dans une atmosphère feutrée autant qu'on y cuisine, avec un équipement technique digne des grands chefs. Dès lors, l'éclairage doit être à la hauteur de cet investissement. Alors comment la lumière peut-elle répondre à cette double fonction de la cuisine ? Réponse à trois voix avec nos experts lumière.
Comme le rappelle Christian Sarrot, consultant en habitat, « la cuisine est la pièce préférée des Français, elle est devenue leur pièce à vivre. Dans les années 2010, la mode était à la cuisine semi-professionnelle tout en inox. Aujourd’hui, on apprécie une atmosphère plus familiale : l’îlot central est en recul au profit de la grande table, avec un retour aux matières naturelles, au bois, qui s’accompagnent d’un éclairage plus chaleureux ».

Quelle norme d'éclairage pour la cuisine ?
L’éclairage des cuisines domestiques, contrairement à celui de la salle de bain n’est pas normé, néanmoins on préconise généralement 500 lux sur un plan de travail et de 200 lux pour les tables, en s’inspirant de la norme EN 12464-1 qui fixe les niveaux lumineux à atteindre dans les lieux de travail. Rappelons que les cuisinistes distinguent généralement cinq zones dans une cuisine : zone cuisson/ zone froid / zone lavage / zone rangement / zone plan de travail.

Entre éclairage technique et lumière d'agrément -
par Thierry Walger, concepteur lumière, Le point lumineux
La lumière dans une cuisine se situe entre l’éclairage technique et la lumière d’agrément. En ce qui concerne l’éclairage technique, cela signifie que nous avons besoin d’une belle uniformité et d’éviter les ombres pour celui qui prépare la nourriture : on complétera donc la lumière qui vient de plafond par un éclairage latéral. Alors pour passer à une lumière d’agrément lors des moments de convivialité, il s’agira de multiplier les sources pour faire varier les ambiances, en veillant à pouvoir contrôler ces sources finement, via différents interrupteurs. Pourquoi ne pas installer des luminaires sur pied ou à poser dans une cuisine ? Lorsqu’un luminaire est branché à une simple prise, « à l’ancienne » , on peut facilement faire évoluer les ambiances, sans avoir à reprendre tout le faux plafond.
Il faut également garder à l’esprit que dans une cuisine comme ailleurs, la lumière est culturelle. L’agence Le Point lumineux travaille beaucoup à l’étranger et conçoit l’éclairage de résidences princières ou de villas privées : il s’agit avant tout de laisser parler le client, qu’il expose ses besoins et ses désirs. C’est la synthèse de cet échange couplé à la vision de l’architecte qui permettra de proposer une mise en lumière en harmonie avec la sensibilité esthétique du client.
Identifier les différentes zones à éclairer – par Marie-Line David directrice déléguée chez FD Éclairage(appelé également Le Spot français), spécialiste de l’éclairage domestique fabriqué en France depuis quarante-cinq ans.
Dans une cuisine, il est nécessaire d’identifier les différentes zones à éclairer, à savoir :
Les plans de travail, la table et/ou l’îlot central,
Les façades des meubles,
La base lumineuse, soit un éclairage minimal partout dans la pièce qui pourra ensuite être retravaillé en accentuant les zones fortes nécessitant plus d’intensité,
Et éventuellement, éclairer un mur en indirect pour l’ambiance.
Cuisine conviviale éclairée par différentes sources implantées au plafond et sous les meubles hauts de FD Eclairage© FD Eclairage Ces différentes zones sont à traiter séparément, car elles ne nécessitent pas le même type de produit d’éclairage ex : des produits intensifs sur les plans de travail, des produits plus extensifs pour la base lumineuse, des spots spécifiques pour les dessous de meubles etc…
Les plans de travail doivent bénéficier d’un éclairage ciblé et efficace. C’est-à-dire, l’utilisation de spots avec des optiques efficaces qui vont diriger la lumière vers la zone choisie pour obtenir les 500 lux recommandés par l’AFE. On privilégiera l’utilisation de produits avec des faisceaux intensifs 30-40° d’ouverture. Regardez les courbes d’éclairement dans les catalogues professionnels pour vérifier si vous aurez bien vos 500 lux sur le plan utile.
Les pièges à éviter : les spots doivent être implantés à la verticale des plans de travail pour ne pas risquer les problèmes d’ombre portée. Les plans de travail très foncés devront être éclairés avec des spots plus puissants pour compenser leur mauvais facteur de réflexion.
Si vos clients souhaitent une suspension sur la table ou l’ilot central, vérifier avec eux que ce luminaire dispensera une lumière dirigée (lampe directionnelle obligatoire ou module led avec optique dans la suspension), sans quoi vous n’aurez pas vos 500 lux sur le plan utile.

Les façades des meubles doivent impérativement être mises en lumière. Il vaut mieux moins éclairer le sol, et privilégier les meubles. Notre regard se pose plus facilement sur les murs que sur le sol dans une cuisine. Je conseille un éclairage en « lèche meuble » comme sur l’illustration ci-dessous, avec des spots ayant des faisceaux intensifs, surtout devant les meubles toute hauteur.

Pour la base lumineuse, si votre cuisine est grande, on choisira plutôt des faisceaux extensifs (60-80° d’ouverture), afin de couvrir une plus grande surface au sol avec la lumière, ce qui permettra de limiter le nombre de spots au plafond. Si la cuisine est étroite et que les façades des meubles et l’ilôt central sont éclairés, la base lumineuse n’est pas forcément nécessaire.
Astuce pro : il est intéressant de créer ses bases lumineuses avec des produits basse luminance afin d’amener du confort visuel dans la pièce.
Et pour finir, si vous disposez d’un grand mur sans fenêtres ni meuble dans votre cuisine, il est possible de prévoir un éclairage indirect de ce mur, soit avec un éclairage rasant (implantation des vos spots faisceaux intensifs au ras du mur), ou bien à l’aide d’encastrés asymétriques qui mettront un mur de tableaux ou une belle fresque en valeur.

Éclairer une cuisine selon son objectif : fonctionnel ou décoratif – par Stéphane Veron, dirigeant de MSA France
Pour éclairer une cuisine, il s’agira de définir son objectif et de choisir un produit adapté :
Objectif fonctionnel : on privilégiera les profils, les réglettes, les spots à positionner en applique ou à encastrer dans le meuble;
Objectif décoratif : on pourra utiliser des LED flexibles, des étagères lumineuses, ou des spots.
Certains produits sont réglables en intensité lumineuse ou en température de couleur. Ils s’allument et s’éteignent de manière progressive afin de ne pas heurter la sensibilité de l’œil.
La tendance des dernières années étant aux cuisines ouvertes, il est donc tout à fait possible d’adapter l’ambiance en fonction du moment, soit avec le même éclairage variable, soit en allumant par intermittence les éclairages fonctionnels puis décoratifs.
Outre l’intensité de l’éclairement, il faut tenir compte de la température de couleur pour assurer un confort visuel optimal. Réservons le blanc neutre, voir le blanc froid, aux zones de travail, et le blanc chaud pour les éclairages d’ambiance.
L’indice de rendu des couleurs est également important : plus il est élevé, mieux les couleurs des objets seront restituées. Les éclairages LED ont généralement un IRC supérieur à 85, ce qui est la norme.

Le point sur le vocabulaire de la lumière…
Lux : Le lux est l’unité d’éclairement (symbole lux), c’est-à-dire la quantité de lumière reçue sur une surface donnée. Un lux est l’éclairement d’une surface qui reçoit, d’une manière uniformément répartie, un flux lumineux d’un lumen par mètre carré. Le lux se mesure avec un luxmètre, appareil portatif et simple d’utilisation, largement utilisé en éclairage extérieur pour mesurer par exemple l’éclairement sur trottoirs et les voiries et confronter ces résultats aux prescriptions normatives. L’œil humain est capable de s’accommoder à des éclairements très variables : 120 000 lux en pleine journée ou 1 lux pour une nuit de pleine lune.
Température de couleur : Permet de définir la tonalité de lumière ou couleur de lumière d’une lampe. Elle s’exprime en kelvin (symbole K) (source https://www.ace-fr.org/). La valeur de référence est la lumière du jour. Cette température a été normalisée par la CIE à 6500 K, ce qui correspond au moment où le soleil est au zénith, soit une teinte de blanc très froid. À titre d’exemple, une lampe halogène se situe à 3200 K.
Indice de rendu des couleurs (IRC) : L’indice de rendu des couleurs (IRC) permet de mesurer la capacité d’une source lumineuse artificielle à rendre les couleurs, telles que celles-ci apparaissent sous la lumière solaire. Pour ce faire, l’IRC s’exprime via une échelle allant de 0 à 100, l’indice 100 étant attribué à la lumière solaire. Un IRC entre 90 et 100 permet un excellent rendu des couleurs. Un IRC entre 80 et 90, permet un bon rendu des couleurs. Tous les luminaires intérieurs doivent ainsi avoir un IRC égal ou supérieur à 80, conformément à la directive ecodesign 2019/125/CE et au règlement délégué ELR-SLR. Pour les luminaires extérieurs, il n’existe pas d’exigence d’IRC.
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