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Quel matériau choisir pour les mâts d'éclairage public ? Nouvelle donne.

  • Aude Grard
  • 30 juin
  • 6 min de lecture

Renouveler son parc d’éclairage engage pour trente ans, le choix du mât est donc primordial. Si la question du coût et de la durée de vie reste centrale, les critères esthétiques et environnementaux — bilan carbone et recyclabilité — préoccupent de plus en plus les collectivités. Alors, acier, aluminium ou bois ? Prismes fait le point sur la question et remercie nos deux experts du mois, Grégory Flipo de TMC innovation et Michel Charbon de Valmont France, pour les informations apportées. 



Les mâts d'éclairage public face à la norme EN 40.


La norme EN 40 définit les contraintes techniques en matière de conception, de fabrication et de vérification des mâts d’éclairage public, selon les zones d’installation et les qualités de résistance mécanique des matériaux. En outre, elle permet aux industriels d’apposer le marquage CE sur leurs produits. Si elle englobe les mâts d'éclairage public en acier et en aluminium, elle ne concerne pas le bois. Mais qu’est-ce que cela signifie concrètement pour une collectivité ? Il est certain que le marquage CE permet de comparer immédiatement un produit par rapport à un autre, de certifier un niveau d’exigence. La réflexion est donc un peu plus complexe pour les mâts en bois qui n’entrent pas dans cette norme. Néanmoins, certaines entreprises spécialisées dans les mâts en bois, comme Aubrilam, ont volontairement entrepris des démarches pour pouvoir apposer le marquage CE sur leurs produits et ainsi pallier ce problème.


Combien ça coûte ?


Sur la question du coût, l’acier reste le matériau le plus économique. Comme l’explique Michel Charbon « l’acier est un produit de grande distribution utilisé partout. De plus, les entreprises qui développent l’acier ont affiné depuis longtemps des process industriels puissants, permettant encore de réduire les coûts ».

L’aluminium est donc généralement plus cher, ce qui est aussi généralement le cas pour le bois, néanmoins les prix varient sensiblement d’un fabricant à un autre. Grégory Flipo témoigne : « Si on en a la volonté, le bois offre la possibilité de proposer un produit accessible aux collectivités — un mât en bois peut être conçu de manière sobre, dans un esprit low tech. »


Bien choisir le matériau des mâts d’éclairage public : l’esthétique et les possibilités de personnalisation.


En France, on estime que les mâts en acier représentent 85 % du parc, les mâts en aluminium 10 % et les mâts en bois et béton, 5 %. Mais ces proportions sont en cours d’évolution. Ainsi, Grégory Flipo estime : « il existe un vrai élan vers le mobilier en bois, de la part des prescripteurs qui plébiscitent le bois en tant que matériau biosourcé, appréciant également son aspect naturel et chaleureux ; comme de la part des maîtrises d’ouvrage qui souhaitent décarboner leur espace public ».



L’aluminium présente quant à lui de grandes qualités de maniabilité : galbé, extrudé, découpé au laser… les possibilités infinies de personnalisation séduisent les architectes, comme les concepteurs lumière. Contrairement à l’acier, il peut être percé sur place pour ajouter des crosses ou des projecteurs, ce qui lui confère un caractère évolutif. Enfin, sa légèreté en fait un matériau maniable, facile à installer. Michel Charbon ajoute : « l’aluminium possède une qualité de finition particulière, une surface agréable à l’œil. Avec l’anodisation, il est possible de colorer le mât tout en gardant cet effet de matière propre à l’acier. C’est le matériau idéal pour les produits décoratifs ». 


Mâts en aluminium sur un boulevard
Mât aluminium Jalousie de Vichy, Valmont France (Maitrise d’ouvrage : Ville de Vichy – Maitrise d’œuvre : Axe Saône – Entreprises : Vigilec – Bouygues E&S)

Résistance et durée de vie.


Durée de vie. Pour l’aluminium comme pour l’acier, la norme EN 40 prévoit une durée de vie 25 ans, la durée annoncée par les constructeurs de mâts en bois se situant entre 15 et 25 ans. Mais la durée de vie réelle de la plupart des mâts en acier et en aluminium pulvérise bien souvent cette prévision, dépassant 40 ou 50 ans, ce qui reste impossible à atteindre pour des mâts en bois.


Corrosion. Contrairement aux idées reçues, l’aluminium résiste encore mieux que l’acier en milieu salin, si on prend la précaution d’isoler les pieds de mâts.


Résistance mécanique. L’acier est le matériau le plus résistant d’un point de vue mécanique, ce qui permettra de créer des ouvrages de grande hauteur, qui seraient beaucoup plus coûteux en aluminium.



Entretien. L’aluminium et l’acier ne nécessitent quasi pas d’entretien, si ce n’est un nettoyage régulier. Quant au bois, l’entretien dépend directement du parti pris industriel du fabricant, cette question est donc primordiale à étudier. En effet, les mâts en bois lamellé-collé sont protégés par une lasure qu’il faut renouveler sur place tous les 5 à 7 ans. En revanche, un mât en bois brut ne nécessitera aucun entretien. Comme l’explique Grégory Flipo : « lorsqu’on utilise un bois brut non traité, celui-ci va griser et se fendiller au fil du temps, tout en gardant l’intégralité de ses propriétés mécaniques. Nous sommes habitués aux matériaux “morts”, absolument stables. Or, avec le bois, il faut assumer un matériau vivant, qui évolue ».


Recyclabilité et bilan carbone des matériaux.


L’aluminium et l’acier se recyclent extrêmement bien. En ce qui concerne l’acier, Grégory Flipo précise : « l’acier est le matériau le mieux recyclé au monde, les gens vont d’ailleurs jusqu’au fond de l’eau pour le récupérer et le valoriser ». Si on parle souvent de la recyclabilité à 100 % de l’aluminium, il faut savoir que « cette proportion est en réalité de 80 % pour les mâts, l’ajout de matière neuve étant indispensable pour maintenir la qualité de résistance mécanique des mâts », comme l’explique Michel Charbon.


En ce qui concerne le bilan carbone de ces deux matériaux, il faut garder à l’esprit qu’il n’existe aucun minerai d’acier et d’aluminium en France : le minerai d’acier provient généralement d’Amérique du Sud, le minerai d’aluminium, d’Amérique centrale ou d’Afrique. Ainsi, selon Grégory Flipo : « pour produire 1 tonne d’acier, on émet 2 tonnes de CO2 dans l’atmosphère, pour le recycler, on émet 1 tonne. Et pour produire une tonne d’aluminium, on émet 4,5 tonnes de CO2, c’est beaucoup. En revanche sa recyclabilité est moins émettrice en CO2. Néanmoins, il faut garder à l’esprit que ces bilans sont également liés aux modes de production des matériaux : l’énergie des hauts fourneaux est-elle très carbonée ? Comment est produite l’électricité qui les alimente ? ».  Rappelons sur ce point qu'environ 3% des émissions mondiales de gaz à effet de serre proviennent de la production d'aluminium.


L’entreprise TMC s’est donc tournée vers le bois pour ces raisons : « en réalisant nos analyses du cycle de vie des mâts, nous avons découvert que c’était la matière première utilisée qui avait le plus d’impact sur le réchauffement climatique. Nous avons donc décidé de diminuer la proportion d’acier et de développer un mât en bois brut, avec une embase en acier. L’essence choisie est le Douglas qui pousse en France, il n’y a donc aucune émission de CO2 lors de la production du matériau, puisque les arbres stockent le carbone. Les émissions concernent donc uniquement la phase de production du mât, elles-mêmes limitées par le circuit court.  De plus, l’utilisation pour les mâts d’un bois brut, non traité chimiquement, permettra sa réutilisation : ce bois aura plusieurs vies. On estime en effet à 75 ans la durée de vie de ce bois qui aura été recyclé plusieurs fois, alors que le temps de pousse d’un Douglas est de 50 ans ».



Portraits des experts du mois :


Grégory Flipo est dirigeant de TMC Innovation qui conçoit et fabrique du mobilier urbain d’éclairage? alliant design, performance et adaptabilité. À l’écoute des prescripteurs et des acteurs du secteur, l’entreprise s’engage depuis des années dans une démarche d’innovation et d’éco-conception.

Labellisés Origine France Garantie, ses produits durables s’appuient sur un savoir-faire reconnu en mécano-soudure, assemblage et plus récemment éclairage.


Michel Charbon est responsable de la prescription nationale chez Valmont France, est une filiale du groupe Américain Valmont depuis 1989.


Valmont France c’est 260 collaborateurs répartis sur 2 sites de production : Charmeil (03) site de production des mâts acier – Rive de Gier (42) site de production des mâts aluminium.

Valmont France conçoit, fabrique et commercialise des mâts fonctionnels, décoratifs et sur mesure en acier, en aluminium et en bois (à travers la filiale finlandaise Tehomet du groupe) pour l’éclairage public, la signalisation, les lignes électriques, les télécommunications et l’éclairage sportif.


Le point sur la vocabulaire de la lumière...


Analyse du cycle de vie (ACV) : L’analyse du cycle de vie est la méthode à utiliser pour déterminer l’empreinte environnementale d’un produit et pour en faire une déclaration environnementale. Pour les luminaires, les règles d’ACV sont exprimées dans le document PSR-0014 et donnent lieu à l’établissement de fiches PEP (profils environnementaux produits). Si ces fiches PEP sont validées par l’association PEP ecopassport, elles figurent alors dans la base Inies, base de données environnementale et sanitaire de référence pour les calculs de la RE 2020.




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